Résumé
On leur avait dit que c’était une ère nouvelle. Tout était permis. Quelques-uns y ont cru.
« Une heure du matin. Je rentre chez moi, à moitié soûl. Mes parents m’attendent. Ils voudraient prendre un air sévère, mais ils sont trop inquiets pour en être capables.
- Où est-ce que tu étais?
- Je préparais la révolution. Vous ne pouvez me comprendre. »
Jean-François Kelly habite la banlieue de Montréal. Pour lui, tout a débuté le 22 novembre 1963, lorsqu’une balle de fusil fracassait le crâne de John F. Kennedy. Jean-François était en septième année. Cet événement deviendra le point de départ d’une aventure, celle d’une jeunesse révolutionnaire, qui durera près de vingt ans et marquera à jamais la vie de Jean-François et de ses deux camarades, Jacques et Pierre-Paul.
Engagés dans une lutte afin de remodeler la face du monde et surtout celle du Québec, ils se heurteront très rapidement aux choix draconiens qui s’imposent lorsque l’amour se mêle à l’idéologie, lorsque la réalité refuse de se conformer au rêve.
François Gravel
Auteur de plus de 100 livres récompensés par de nombreuses distinctions, François Gravel possède le rare talent de...
Auteur de plus de 100 livres récompensés par de nombreuses distinctions, François Gravel possède le rare talent de s’adresser avec le même plaisir...
Auteur de plus de 100 livres récompensés par de nombreuses distinctions, François Gravel possède le rare talent de s’adresser avec le même plaisir contagieux à tous les publics,...
Auteur de plus de 100 livres récompensés par de nombreuses distinctions, François Gravel possède le rare talent de s’adresser avec le même plaisir contagieux à tous les publics, jeunes et moins jeunes. Faisant preuve d’un humour inimitable, il sait aussi être tendre ou grave selon les œuvres. Chez Québec Amérique, il signe plusieurs livres marquants, parmi lesquels Ostende, La ...
Auteur de plus de 100 livres récompensés par de nombreuses distinctions, François Gravel possède le rare talent de s’adresser avec le même plaisir contagieux à tous les publics, jeunes et moins jeunes. Faisant preuve d’un humour inimitable, il sait aussi être tendre ou grave selon les œuvres. Chez Québec Amérique, il signe...
Auteur de plus de 100 livres récompensés par de nombreuses distinctions, François Gravel possède le rare talent de s’adresser avec le même plaisir contagieux à tous les publics, jeunes et moins jeunes. Faisant preuve d’un humour inimitable, il sait aussi être tendre ou grave selon les œuvres. Chez Québec Amérique, il signe plusieurs livres marquants, parmi lesquels Ostende, La Cagoule et la...
Chapitre 1
Vingt-deux novembre 1963. Une balle de fusil, tirée depuis le septième étage d’un entrepôt de livres, fracasse le crâne de John F. Kennedy. Jackie est éclaboussée de sang et de morceaux de cervelle.
À l’école Sainte-Claire, en banlieue de Montréal, Mme Giguère, titulaire de la classe de septième année, se promène entre les rangées de pupitres et surveille le travail de ses élèves. La maîtresse est sévère et les problèmes de mathématiques difficiles, aussi sommes-nous parfaitement silencieux quand la secrétaire vient frapper à la porte pour avertir qu’il faut, toutes affaires cessantes, nous rassembler dans la grande salle.
Jamais les enfants ne se sont réunis aussi vite, ni aussi silencieusement. Chacun a pris son rang, les petits en avant et les grands derrière, et suit des yeux M. Désautels, le principal, qui monte lentement sur l’estrade, la tête basse, et prend place à côté du drapeau.
Son discours est bref: John Kennedy, le président des États-Unis, a été assassiné cet après-midi à Dallas, au Texas. C’était un grand homme, un grand président et un bon catholique à qui Sa Sainteté le Pape Paul VI avait récemment rendu visite. Prions pour son âme et pour la paix dans le monde.
Sur le chemin du retour, les discussions vont bon train. Pierre-Paul est certain qu’il s’agit d’un coup des Russes: depuis qu’ils disposent d’une bombe de cinquante mégatonnes (la précision du chiffre nous glace d’effroi), ils ne pensent qu’à déclencher la guerre. Jacques s’oppose à cette théorie. D’après lui, Khrouchtchev est un peureux qui court tellement vite qu’il en perd ses souliers. Non, c’est un coup des Cubains qui veulent se venger d’avoir perdu la guerre des cochons, quand Kennedy avait encerclé leur île avec ses grands porte-avions, les fameux blocus. Un autre penche plutôt pour le péril jaune: les Japonais, ce sont sûrement les Japonais.
Leur mémoire des noms étrangers, leur science infuse des choses politiques et l’assurance avec laquelle ils émettent leurs opinions me remplissent d’admiration. Quant à moi, je ne peux penser qu’à des choses futiles: le temps est gris et il est trois heures, comme un Vendredi saint; Kennedy et moi, Jean-François Kelly, avons les mêmes initiales; ma cousine Carole aura bien de la peine, elle qui aimait Kennedy au point de lui avoir consacré un scrap-book complet.
Les souvenirs de ces photos, tirées de Life ou de Paris-Match, me reviennent, pêle-mêle: John en joueur de football, à l’université. John et Jackie en maillots de bain, sur une plage, avec Caroline et John-John. Le chapeau rond qui seyait si bien à Jackie et si mal à toutes ses imitatrices. Rien qu’en regardant les photos de leur mariage, j’avais appris des dizaines de mots nouveaux: taffetas, corsage, orchidées (des fleurs très rares et très chères, avait dit Carole), symbole, protocole et surtout yacht, qui m’avait valu plus de cinquante points dans une partie de scrabble avec ma mère. Les yachts, le football, les plages, les mariages et le bonheur existeraient-ils encore après l’assassinat du président?
D’un coin de rue à l’autre, le groupe d’enfants se disperse. Aussitôt que je me retrouve seul, je me mets à courir, dans l’espoir d’être le premier à apprendre à mon père une nouvelle qui, j’en suis sûr, le passionnera. Mais il sait déjà. J’aurais dû m’en douter: il écoute souvent la radio en rédigeant ses contrats d’assurance, jamais il n’aurait pu rater une information de cette importance.
Dans le salon, les stores sont baissés et le volume de la télé est au maximum. Assis sur le bout de son fauteuil, la pipe au bec, il remarque à peine mon arrivée. Je m’assois sur le divan et regarde avec lui l’image sautillante de la tête de Kennedy, projetée vers l’arrière, de la limousine qui s’emballe…
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