Résumé
C’est un livre que j’ai écrit presque malgré moi, sans doute parce que je tremble à la simple évocation des faits que j’y raconte. Cependant, une petite voix intérieure me disait : « Mais oui, écris cette histoire. Ce sera le point final, ta façon d’avoir le dernier mot sur ces événements terribles. » Mais je sais aujourd’hui que la mort seule mettra le point final à cet épisode de ma vie si fondateur, si semblable à une naissance douloureuse. Jamais, je crois, je n’aurai été aussi complètement athée que maintenant, à présent que le souvenir de ce fatidique été 2004 s’évanouit peu à peu. Et pourtant, j’aime comme jamais cette image du Christ, figure mythique de tous les hommes, portant une croix, tombant, puis se relevant et marchant vers une vie autre.
Jean-François Beauchemin
Jean-François Beauchemin
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Un jour je suis mort. C’était vers le milieu de l’été, le ciel était d’un bleu immaculé. C’est l’un des souvenirs les plus précis que je conserve de ce jour-là. Je me suis toujours demandé : « Pourquoi cet événement s’est-il produit au moment où le ciel tout entier semblait se détourner du malheur? » (…)
C’est une expérience peu banale, qui n’a pas grand chose à voir avec ce qu’on en imagine habituellement. On va mourir, c’est tout. On n’a pas le temps d’être triste, ni même d’avoir vraiment peur. Dans l’urgence du moment, on a le curieux réflexe de rassembler des images, de se composer en catastrophe une sorte de bagage peut-être, comme si on partait en voyage et qu’on réalisait soudainement que, tout au bout de la piste, l’avion n’attend plus que nous pour décoller.