Résumé
Finaliste au Prix littéraire du Gouverneur général 2008 - Catégorie Romans et nouvelles
Titulaire d’une mention d’excellence au Prix du Roman 2008 des Écrivains francophones d’Amérique
Dans la nuit tiède de l’Orient, un vieil homme murmure à sa femme mourante, plongée dans l’inconscience, des paroles sur le temps qui passe, le doute, l’amitié, la douleur, les enfants, le hasard, l’amour. Un singulier dialogue à une voix s’établit là, dans le halo d’une lampe, où se traduisent tout à la fois un extraordinaire sentiment de vivre et l’infinie tristesse des destins qui s’achèvent.
Cet homme, on le déduira bientôt, s’appelle Jésus de Nazareth. Survivant à la croix romaine, il a vécu pendant plus de cinquante années auprès de Marthe, la sœur de son meilleur ami, Lazare de Béthanie. Jusqu’à cette nuit ultime, il n’avait guère parlé de lui-même, des événements l’ayant conduit au supplice, de la pensée foudroyante qui l’avait fait, à trente-trois ans, se détourner de Dieu. Mais l’heure n’est plus au silence ou, plutôt, l’heure est venue d’opposer au silence de la mort une parole serrant de près cette vie qui s’enfuit.
Jean-François Beauchemin
Frabizio Perozzi
Tous ceux que j’ai connus au lendemain de la mort de Lazare ont vu sur mon visage se dessiner des traits qui n’auraient dû paraître qu’avec le grand âge. Je sais cette nuit, pour en distinguer de nouveaux se formant devant toi, que ce sont là les rides que creusent les larmes d’un homme à qui l’amour avait tout promis. On croit pouvoir se détacher de ces chagrins en se consolant avec ce qu’ils ont de formateur, avec ce que la souffrance nous apprend malgré nous sur la dignité, ce sentiment trompeur d’un triomphe sur les séismes du hasard. Mais la dignité n’a rien à voir avec la joie perverse que prend ce hasard à nous reprendre le vertige qu’il nous avait accordé. On ne se détache de rien, et ce que nous tirons des pleurs n’est instructif que pour la moitié de nous-même occupée à leurrer l’autre moitié.